Sophie MAGERAND

Sophie MAGERAND

Conférencier

Historienne d’art et archéologue, Sophie Magerand, conférencier, est passionnée par le monde gréco-latin. Ses études et ses nombreux voyages la rendent intarissable sur le sujet. Conférencier pour des voyages culturels depuis plus de 15 ans, elle saura vous transmettre sa passion et vous montrer les liens et la richesse de cette Méditerranée antique. 

Chaque semaine, retrouvez Sophie Magerand sur Radio Courtoisie le vendredi de 7h45 à 8h00 pour une chronique voyages ; retrouvez les chroniques en cliquant ici

Pour mieux la connaître, découvrez l’article qu’ARTEVIA avait écrit il y a quelques années : « Sophie Magerand, guide et voyageuse – Une passion méditerranéenne »

Sophie me reçoit dans son agence, au cœur de Paris. Cela fourmille, bruisse et travaille. Avec son enthousiasme communicatif, elle nous parle de son métier qui est aussi sa passion.

Bonjour Sophie, question rituelle, comment devient-on spécialiste des voyages culturels ?

Sophie Magerand conférencier :
Et bien, je dirai tout d’abord qu’il faut aimer son métier, aimer l’histoire, l’art et les voyages. Savoir s’émerveiller et transmettre. Mais aussi apprécier l’humain ! C’est un métier de relation. Le reste vient avec l’expérience, une expérience très personnelle, car à chaque voyage on y met du sien… et on apprend toujours un peu plus. Plus prosaïquement, j’ai suivi un double cursus : une formation dans les métiers du tourisme et aussi une formation d’histoire de l’art et d’archéologie. J’ai travaillé comme archéologue pendant plusieurs années, sur des chantiers en Tunisie et en Sicile où nous passions six mois par an à gratter, fouiller… et parfois trouver. Ma passion du pourtour méditerranéen est sûrement née à ce moment-là. Par ailleurs, je suis guide conférencière et ai officié pour plusieurs agences de voyages spécialisées dans les séjours culturels. Depuis quelques années, je travaille au sein de l’agence Odeia, petite agence dynamique spécialisée dans les voyages culturels et les pèlerinages, notamment dans le monde méditerranéen.

Pourquoi le pourtour méditerranéen ?

Sophie Magerand conférencier :
Je suis fascinée par l’histoire et la culture de ces pays, que cela soit la Tunisie, la Lybie, la Jordanie, la Grèce ou l’Italie… Je connais bien, très bien même, ces régions : j’ai habité à Rome, puis en Tunisie, je suis allée au moins dix fois en Jordanie et en Terre Sainte… C’est le berceau de l’humanité, peut-être pas au sens biologique, mais certainement au sens… culturel : le christianisme est né là-bas, en Orient puis s’est développé en Europe. La pensée occidentale aussi, en Grèce et plus généralement dans le monde Grec puis partout ailleurs. L’Empire romain a été un catalyseur de toutes ces influences, de par sa puissance et son étendue. Cela me passionne ! Et puis, on peut tirer l’écheveau : je suis allée dernièrement en Ethiopie, civilisation pluri-millénaire s’il en est, dont les relations avec le monde méditerranéen sont innombrables depuis la nuit des temps : de la Reine de Saba au prêtre Jean en passant par Aksoum et les caravaniers. Le christianisme local est émouvant, c’est la deuxième église constituée après l’Arménie, bien avant celle de Rome ou de Gaule ! Toutes ces régions forment un puzzle dont j’essaie de reconstituer les morceaux au fur et à mesure. Cela permet d’ailleurs de comprendre bien des choses du monde actuel. Pour faire visiter une région, il faut donc la connaître et l’aimer, c’est indispensable, en s’appropriant l’histoire des lieux et celle de leurs habitants. Or, « faire » de l’histoire, c’est mener une enquête (Hérodote fut le premier à parler d’ « Historia » ce qui signifie en grec « je mène l’enquête »). C’est comme cela que je voie le tourisme, comme une enquête où tout est lié ! Pas seulement se prélasser sur une plage blanche devant une mer bleue.

Justement, comment trouver l’équilibre entre tourisme et culture ?

Sophie Magerand conférencier :
C’est délicat il faut l’avouer. D’un côté, l’exigence de la programmation culturelle doit être permanente : des présentations de qualité, des guides très bien formés… mais qui soient aussi de vrais guides-conférenciers et pas seulement des universitaires bardés de diplômes mais soporifiques à souhait. Il faut rendre accessible la culture, tout en tirant tout le monde vers le haut. Il faut savoir synthétiser intelligemment, donner des anecdotes mais ne pas se noyer dans les détails et surtout donner du sens. Par exemple, on ne peut pas comprendre le monde grec en ne visitant que la Grèce, c’est totalement réducteur : l’hellénisme a touché l’ensemble du monde méditerranéen ! Il faut par exemple se souvenir que les premiers philosophes ont évolué dans le sud de l’Italie et non en Attique. Mes clients sont certes en majorité des personnes cultivées et connaissant déjà, au moins de manière livresque, la région visitée, mais pas seulement.
D’un autre côté, un voyage culturel, c’est d’abord un voyage. Le séjour doit être agréable et de qualité : hébergement, nourriture – je porte une attention particulière là-dessus – la satisfaction du client passe par la gamelle si je puis dire, animations… Je tâche de proposer un programme complet mais sans courir partout, ce qui est épuisant, pour le groupe comme pour moi. Par ailleurs, nous ne partons qu’en petit groupes (15 personnes maximum), ce qui donne de la souplesse, de la mobilité et une ambiance quasi familiale. C’est ce que recherchent les participants aujourd’hui et c’est pour cela qu’ils nous sont particulièrement fidèles.

Et la tentation du musée permanent ? Dès que l’on parle de patrimoine, on imagine des vieilles pierres, pas très vivant tout ça…

Sophie Magerand conférencier:
C’est le gros défaut de certains pays, la France par exemple. En cela les pays du sud de la Méditerranée peuvent nous donner des leçons. Leur patrimoine est vivant. Bien entendu, nos archéologues et autres conservateurs hurleraient (et nous un peu aussi évidemment !) en voyant les chèvres et moutons divaguer dans les ruines de Carthage ou bien les moines éthiopiens repeindre à l’acrylique des peintures du Vème siècle. Cela dit, toutes proportions gardées, je préfère personnellement ce patrimoine qui vit. L’exemple typique est Jérusalem : les vestiges sont innombrables et la foule aussi, qui prie, qui se chamaille (c’est peu dire) et qui fait vivre ces lieux chargés d’histoire, c’est le cas du Saint-Sépulcre ! Avoir des racines, c’est essentiel, en vivre, c’est encore mieux. Les voyages que nous proposons veulent être complets.

C’est-à-dire ?

Sophie Magerand conférencier :
On ne visite pas seulement des vieilles pierres. On apprend à connaître une civilisation. La gastronomie, la musique, l’artisanat joue un rôle important. On essaie d’être originaux, pas pour chercher l’originalité en soi, mais pour découvrir de belles choses cachées. Par exemple, en Sicile, tel site classé une étoile au guide Michelin, mériterait, selon moi, trois étoiles. Certains sites sont incontournables, mais nous tâchons aussi de visiter des lieux très peu visités. Après plusieurs années de terrain, je connais personnellement des propriétaires de demeures historiques qui nous ouvrent leur domaine. Autre exemple en Sicile, à côté de Sélinonte, il y a une carrière de pierre qui a été laissée à ciel ouvert depuis plus de 2400 ans, quasiment abandonnée en plein travail ; et il n’y a personne, c’est magique !

Et le rapport avec les habitants ?

Sophie Magerand :
Je suis toujours très prudente et informe précisément les clients sur ce sujet. Il y a deux écueils à éviter : se comporter en conquérant ou bien « jouer à l’autochtone ». Non, restons ce que nous sommes et abordons humblement les pays visités. Il faut se faire discret pour ne pas rentrer dans la vie des gens quand ils n’ont rien demandé. Par ailleurs, nous évitons de devenir un « distributeur de billets » pour les habitants : ce n’est pas leur rendre service et on fausserait la relation. Je pense à l’Ethiopie qui est un pays pauvre. Faire l’aumône dans la rue n’est pas bénéfique, en revanche fournir du matériel scolaire à des écoles nécessiteuses me semble plus profitable. Bien entendu, certaines étapes sont incontournables, dans ce cas, il faut jouer le jeu : par exemple, prendre le thé avec un vrai-faux bédouin dans sa tente (et son 4×4 caché derrière la dune…) ; nos guides locaux sont friands de ce genre de choses. A petites doses, on s’y plie, mais c’est tout ; les guides qui nous connaissent bien savent que ce n’est pas… notre tasse de thé !

Des projets ?

Sophie Magerand :
Oh oui ! Continuer à voyager. L’an passé, j’ai découvert la Russie… qui n’est pas sans lien avec le monde méditerranéen d’ailleurs. Continuer à creuser l’esprit des civilisations et partir à la découverte des chrétientés un peu oubliées par les occidentaux (en Turquie, notamment dans le Tur Abdin qui signifie la Montagne des Serviteurs de Dieu, en Inde, en Irak). Dès l’an prochain, nous partons en Arménie et en Iran !

Merci Sophie !